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NOSé, Bruno Francoz, Né à Cluses ( 1971- 2000) Sauve (30)

NOSE 
J'ai rencontré Nosé dans des circonstances fortes à Marseille et à Sauve. Je me souviens de discussions, de sourires, de lui en train de peindre dans la musique, lui me parlant à la caméra. Il avait peint une fresque sur un mur du squat de Marseille. Son corps entier était recouvert de peinture noire comme un mineur qui revient du travail. Ses yeux bleus devenaient plus bleus au travers de sa suie de peintre. 
Tout de suite, ça se sent, il y a quelque chose des grands dans l'art de Nosé. C'est quelque chose qui prend et aspire, une invitation à pénétrer l'être en contournant les parois objectives de notre nature humaine. On se retrouve direct dedans, dans un intérieur mal défini, qu'on reconnaît sans pouvoir la nommer, nous sommes déjà venus là. L'arabesque de Nosé est une réminiscence. 
Violent sans violence, il navigue, échappant aux mots, parce que c'est une sensation. Derrière les traits, d'autres évolutions, le silence du chaos, le cri du silence. Calme- et inquiétant, c'est plonger dans des ténèbres tendres, dans une douce douleur. Et lui, là, conscient et nonchalant face à ça, ce qu'il produisait, n'hésitant pas à le désacraliser, à l'abîmer tout en sachant ce qu'il faisait, dans la construction même de la pièce et de son art. Les méandres des peintures de Nosé provoquent des échos, des ondes de certains de nos circuits secrets, comme une radiographie de divers voyages intérieurs. 
Il est fascinant comme les mots ne peuvent écrire un individu. Nosé me faisait quelque chose. Je l'ai rencontré, lui, sa personne et aussi au travers de ceux qui l'entouraient, surtout Sandra qui m'a parlé de lui, et Anne-Lise aussi. J'ai observé ce qu'il provoquait, en moi, chez les autres, ceux qui l'aimaient. C'est quelque chose d'à peine dicible, de délicat, d'extrême, de fin, aux frontières. La beauté incroyable de Nosé, ses paroles et son comportement, renvoyaient à nos propres limites, à notre douleur, au sens de l'existence. Il est impossible d'oublier Nosé, même si on l'a croisé une fois, un instant, par son unique façon d'être, son unique rapport à la vie. S'il avait trouvé la mort dans la vie, ou plutôt l'ultime angoisse qui fait notre relation à la vie, il est certain qu'il met de la vie dans la mort et qu'il n'y a pas de barrières pour lui. Sauf que ces barrières entre la vie et la mort existent pour nous et que ça, c'est le plus dur. Nosé vivait avec quelque chose de fort, de trop fort, quelque chose que certains de ceux qui l'aiment savent. J'ai souvent pensé à lui comme de ces rares personnes qui nous éclairent, qui nous renvoient à une profondeur vertigineuse et impalpable, qui prennent, même sans le vouloir, les risques du vrai et du pur. 
Je pense aujourd'hui à lui avec une tendresse particulière, j'y associe ma tendresse pour sa compagne de vie. Nosé dort de son sommeil de Nosé. Il est toujours là dans l'amour que les autres lui portent par ses traces indestructibles, dans sa peinture qui ne se lassera pas de nous emmener dans les intimités agréables et désagréables de nos corps et pensées. Nosé est là.

 

Marie Debray, le 16 mars 2001.NOSé


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NOSé, Bruno Francoz
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